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  • Photo d'illustration de la forêt abitibienne © Sarah-Émilie Nault

Comment un jeune de 26 ans, perdu dans le bois, a réussi à survivre seul pendant un mois?

L’histoire de ce jeune autochtone de 26 ans, Percy Poucachiche, qui a réussi à survivre en forêt en Abitibi pendant un mois en mangeant des bleuets et des framboises fascine. Comment a-t-il fait?

Mario Dumont s’est entretenu avec Mathieu Hébert, cofondateur de l'école de survie Les Primitifs, sur les ondes de LCN, jeudi afin d’en savoir plus.


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Quels sont les dangers?

« L’exposition aux éléments, le fait de ne pas pouvoir se protéger du soleil, du froid, de la pluie. Ce sont les premières choses qui vont aggraver la situation dramatique. Les coups de chaleur, on y pense moins au Québec, mais quelqu’un qui est exposé au soleil et qui n’a pas accès à de l’eau peut faire un coup de chaleur avec évanouissement, vomissements, nausées, maux de tête. Ça accélère le processus vers la mort. »

Meilleur mois pour se perdre

Selon M. Hébert, lorsque la température se situe au-dessus de 12 degrés Celsius, la situation est « tenable ».

« C’est le meilleur mois de l’année pour se perdre. Le niveau des insectes est plus bas, parce que les insectes peuvent rendre fou. Même quelqu’un d’habitué... il y en a trop. Ça peut te faire paniquer, prendre des mauvaises décisions, ça surcharge le système nerveux. Donc là, il y a moins d’insectes, de la nourriture, des petits fruits, il ne fait pas trop chaud, pas trop froid et s’il n’y a pas trop de précipitations, c’est une belle période pour se perdre dans le bois. [L’histoire du jeune autochtone] aurait été complètement différente en novembre », a-t-il expliqué.

Attention à l'eau

Le danger numéro un est de boire de l’eau non potable.

« Le mieux est de faire bouillir l’eau. Quand on n’a rien pour faire bouillir l’eau, ce qui est bien c’est l’eau de pluie. Boire l’eau de rivières ou de lacs, c’est un coup de dés. Ça peut de rendre malade après un certain temps, ou rapidement. Mais si tu as le choix entre mourir de soif ou essayer un cours d’eau, tu essayes le cours d’eau le plus rapide, où l’eau est la plus claire. »

Il précise toutefois que la force du courant ne garantit pas la pureté de l’eau. Néanmoins, il faut privilégier de l’eau rapide et claire.

« Le jeune homme] perdu a eu de la chance. Et notre système immunitaire est capable d’en prendre. »

Gestion de l’énergie

Lorsque les gens sont désorientés en forêt, la gestion de l’énergie corporelle devient capitale afin de survivre.

Le stress, la fatigue, l’adrénaline exigent beaucoup d’énergie et peuvent affaiblir rapidement une personne désorientée.

« La première nuit, les gens ne dorment pas, ils sont sur l’adrénaline. Ils perdent beaucoup d’énergie et ne mangent pas leurs trois repas. Lorsqu’une décision est prise de bouger, il faut marcher en ayant des points de repère. »



À gauche : Mathieu Hébert © Courtoisie Mathieu Hébert
À droite : Percy Poucachiche © Courtoisie de la SQ


Tourner en rond?

Est-il vrai que si l’on marche ne forêt sans point de repère, nous tournons en rond?

« Absolument, puis on le prouve régulièrement lorsque l’on fait des exercices. [...] Même quelqu’un d’expérimenté, s’il ne porte pas attention il va naturellement tourner. Il y une question de dominance au niveau de nos choix, on va plus aimer contourner les arbres d’une certaine façon, prendre à droite ou à gauche inconsciemment, notre démarche. Le type du terrain nous pousse aussi à tourner en rond. »

Prédateurs

Aux Québec, les prédateurs ne représentent pas de réel danger pour l’homme. Ils vont plutôt s’intéresser à votre propre nourriture, ou à du gibier que vous auriez pu capturer.

« Quand les gens commencent à s’affaiblir, ça se peut que des prédateurs commencent à s’intéresser à venir tâter le terrain, mais ça prend un certain temps. Je fais beaucoup d’exercices avec des gens et on n’a jamais de problèmes de prédateurs dans la première semaine. »

Jamais bien loin

Fait étonnant, la plupart des gens qui sont désorientés et qui se perdent en forêt ne sont jamais bien loin du lieu de départ, constate l’expert de survie en forêt.

« J’ai déjà interviewé quelqu’un qui m’a dit qu’il avait traversé trois rivières [pendant qu’il était perdu], mais il y en avait juste une. Il l’a donc traversé trois fois! »

Hallucinations

Selon lui, si le jeune homme perdu en Abitibi a pu survivre aussi longtemps, c'est certainement grâce à son expérience, mais aussi parce qu’il n’a pas paniqué.

« Grâce à son expérience, le facteur peur n’était pas aussi présent, il n’était pas au niveau paniqué. Parce que si c’est la première fois que vous passez la nuit en forêt seul, sans équipement, c’est sûr que le facteur panique va entrer en jeu. Après plusieurs nuits, c’est sûr qu’il y a des hallucinations auditives et visuelles quand on ne marche pas et qu’on est fatigués. Son expérience en nature l’a aidé énormément », a conclu l’expert.


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