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Écovillages et éco-communautés : Comment vivre autrement?

Ni sectes ni communes, mais résolument en marge de l'ordre établi, les « écovillages » ont pour leitmotiv la réduction de l’empreinte écologique et l’entraide sociale. Et certains s’ouvrent au tourisme.

Qu'est-ce qu'un écovillage?

« Sexe, drogue et rock’n’roll » ne riment pas avec « commune » au 21e siècle. Le pied de nez à la surconsommation se traduit maintenant par l’agriculture bio, les énergies alternatives et les constructions écologiques. Le concept d’écovillage, échafaudé autour de l'idée d'un habitat humain durable, responsable et solidaire, a vu le jour au Sommet de la Terre à Rio, en 1992. Certains sont issus du grand retour à la terre des années 1970, comme à Findhorn en Écosse, aujourd’hui considéré comme l'écovillage de référence. Mais il n’y a pas de modèle standard : chaque écovillage est unique. En 1998, l’Organisation internationale des Nations Unies (ONU) décrivait les écovillages comme l’une des meilleures pratiques pour un mode de vie durable.

Le nombre d’écovillages demeure imprécis : le Réseau mondial des écovillages compte 485 inscriptions, dont 26 au Canada, mais certains du Québec n’y figurent pas. « Il y a encore un flou autour des notions des écovillages », dit Leslie Carbonneau, coconceptrice du Répertoire qui l’estime complet à 70%. L’ouvrage clarifie certains de ces concepts : écosystème et interdépendance jettent les fondations des éco-communautés. Celles-ci prennent la forme d’écovillages (à l’échelle d’un village, certains visent l’autosubsistance), d’écohameaux (regroupements plus petits), de cohabitats (habitations rapprochées privées et aires communes) ou d’éco-quartiers (domaines écologiques avec des volets éducatifs et économiques). La plupart adoptent une vision, une gouvernance participative, partagent des espaces et tiennent des activités éducatives ou commerciales.

Les écovillages au Québec

Avec vue sur le fjord du Saguenay, le Groupe de recherches écologiques de La Baie (GREB) a fondé un de ces écohameaux en 1990. Ils y expérimentent des solutions énergétiques, agroalimentaires ou architecturales dont témoignent des maisons en ballots de paille. En Beauce, le domaine écologique du Mont Radar redonne vie à une ancienne base militaire. Dans les Laurentides, près de Weir, Terravie constitue un projet d’écovillage d’accès à la terre et de conservation qui prend forme sur 275 acres achetées en 2006. En Outaouais, le projet embryonnaire de l’écovillage St-Germain rêve d’accueillir 255 résidants.

Depuis 2003, Michel Desgagnés et sa conjointe ont visité une soixantaine de communautés écologiques partout en Amérique du Nord. À la recherche d’un idéal, cet informaticien de Québec y a vu une porte de sortie à notre société, une initiative qui l’a réconcilié avec le genre humain. Selon lui, l’écovillage le plus achevé se trouve dans la région des Bois-Francs : « La Cité écologique de Ham-Nord est 25 ans en avance sur le reste. Ils ont leur école alternative, ils ont fondé plusieurs entreprises, leurs pratiques écologiques sont avant-gardistes et la maturité du groupe est inouïe. » La Cité écologique s’étend sur 600 acres et 115 personnes y vivent. La culture maraîchère biologique couvre 10% du territoire bucolique, avec des vergers, jardins et serres-tunnels. Les Jardins de la Cité complètent le portrait gourmand : vente des produits frais ou de prêt-à-manger, boulangerie et restaurant. On compte également une auberge climatisée à la géothermie, un centre de soins de santé et deux entreprises confectionnant des vêtements éthiques et des objets d’art. « L’écovillage emploie tous ses résidents et recrute même à l'extérieur », souligne Karen Veuilleux-Dutil, copropriétaire de la griffe Respecterre et professeure de yoga.

La Cité écologique fut fondée en 1983 à partir du rêve d’une école dans la nature. Un groupe accoucha du projet éducatif autour duquel se sont développées diverses entreprises. La Cité se fait tranquillement connaître par son agriculture bio et son mode de vie spirituelle. Mais une controverse médiatique la frappe en 1988 lorsque s’y installe le ministre provincial de la Famille, Robert Dutil, avec sa femme et ses enfants. Des détracteurs qualifient la Cité de secte en affirmant que les enfants y sont maltraités et peu scolarisés. Des entreprises encaissent le coup et tombent en faillite. Des enquêtes y sont menées, mais aucune irrégularité n’est trouvée. La Cité s’est refaite dans l’ombre pour revenir avec le titre d'écovillage en 2007.

Aujourd’hui, la deuxième génération est aux commandes à Ham-Nord. « Environ 10 000 personnes visitent la Cité chaque année », calcule Karen. Michel Desgagnés estime que le tourisme constitue un moyen de subsistance pour au moins le tiers des éco-communautés. Depuis 2006, Tourisme Bois-Francs collabore d’ailleurs avec l’écovillage pour offrir des forfaits : « C’est un partenaire économique intéressant », dit Daniel Blanchet, agent de développement à l’organisme. Balade gourmande, visites guidées ou ateliers (production de pain, de savon naturel, développement durable, etc.) figurent au programme.

Michel Desgagnés visite encore des éco-communautés. Mais il développe surtout la sienne : un cohabitat à Québec. « J’avais envie d’emprunter un chemin plus carrossable que celui d’un écovillage », dit-il. Son projet vise à limiter l’étalement urbain, à partager les espaces verts et une maison commune. Un terrain a été acheté en juillet au cœur de la ville et une quarantaine d’habitations privées y sont prévues. Déjà 16 familles s’y sont engagées, signe que le nombre de « marginaux » s'accroît lentement...

Un épisode de La Facture à Radio-Canada, diffusé en février 2010, présentait le projet d’écovillage du Mont Radar et expliquait qu’un manque de planification l’avait mené à l’échec. Des promesses d’achat avaient été signées avant que les limites de l’aspect participatif et communautaire n'aient été clairement établies, d'où le mécontentement de certaines personnes impliquées. Selon Diana Leafe Christian, icône du mouvement mondial des écovillages et auteure du livre Vivre autrement : écovillages, communautés et cohabitats, près de 90 % des initiatives ne prennent jamais leur envol à cause de l'incapacité de s’entendre sur une vision, de problèmes de communication, d’écueils financiers, juridiques ou de zonage. Le projet beauceron a d’ailleurs changé d’étiquette : domaine écologique, un concept plus limité que celui d’écovillage. Son cofondateur Philippe Laramée admet des zones grises dans le contrat initial, mais assure que le projet est désormais clarifié et avance bien. Douze terrains, sur les 50, sont vendus sur ce qui est devenu une base de plein air, plutôt que militaire.

Commentaires (3)
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arlittera - 16/04/2017 13:25
La gouvernance à La Cité Écologique est réellement laissée à la deuxième, et maintenant à la troisième génération (en 2017), en accord avec un principe de base proposé par le fondateur et accepté par la communauté dès le départ. C’est d’ailleurs ce qui assure la pérennité de ce projet.
Pierdore - 02/05/2016 22:40
Terravie un beau projet??? On pensait cela nous aussi, nous étions plus de 23 familles enthousiastes et très motivées qui ont acheté des conventions pour créer un super éco-village. Mais on a vite désenchanté, lorsqu'on s'est rendu compte du contrôle et de la fermeture qu'exerçaient les fondateurs de Terravie. Aujourd'hui, presque la totalité des familles ont démissionné. Quelle triste histoire, quel dommage! il y avait tellement de personnes qui regardaient aller ce projet et en parlaient comme un projet phare à suivre. Pour l'espoir, il faut maintenant regarder ailleurs. Terravie a perdu toute crédibilité. Dix ans plus tard, la majorité des membres attendent toujours le remboursement de leur convention ou de leur prêt généreusement fait à l'organisme. Attention avant de vous laissez charmer par ce projet, informez vous bien.
Roland_Leblanc - 27/07/2013 21:20
Bonjour je trouve intéressant cet article , mais permettez-moi d'ajouter un commentaire: avez-vous vérifier les informations que vous avez obtenues lors de la visite de la Cité Écologique par exemple sur: Aujourd’hui, la deuxième génération est aux commandes à Ham-Nord. Hum , personnellement je doute que ce soit le cas ; je suis un ex-résident qui a connu le mouvement dans les années 1988-1990 . Je serais tenté de croire que la gouvernance est toute autre? Tant mieux si c'est le cas , mais j'en doute...