Rechercher dans le site espaces.ca
  • ©Jimmy Vaudreuil

Entre mers et déserts : la Baja California mexicaine à vélo

L’an dernier, deux vélophiles de la Vieille-Capitale ont troqué le blizzard pour le vent chaud de la péninsule mexicaine, parcourant 1600 km de littoral entre San Diego et San José del Cabo. Soleil, paysages à couper le souffle et innombrables découvertes attendaient les deux amateurs de plein air. Compte-rendu.

Ce jour-là, c’est à l’endroit même où 500 immigrants venaient d’être repoussés par les autorités américaines, quelques jours plus tôt, que nous franchissons des tourniquets en métal en marchant à côté de nos vélos, pour traverser la frontière. Partis de San Diego, à 40 km au nord du poste frontalier de Tijuana, nous n’avons alors droit qu’à quelques démarches administratives et inspections sommaires de sacoches de vélo : bien vite, la Baja California s’ouvrait à nous.

Le premier segment de cyclisme dans le pays est cependant quelque peu intense : à l’heure de pointe, la circulation automobile de Tijuana est des plus denses. Mais bientôt, la route finit par se dégager à mesure que les kilomètres défilent. Les jours suivants donneraient lieu à une succession de kilomètres de ah! et de oh! d’extase, devant la beauté du Pacifique si proche, sur une côte où les hôtels de luxe n’ont pas encore gagné la lutte contre l’immensité sauvage.

La route est tranquille et monte parfois, et nous nous sentons progressivement entrer dans la nature mexicaine. Petit à petit, nous adoptons l’alimentation locale – des tortillas fraîches du jour nous servent désormais de pain. Il fait encore frais le matin et le soir, alors que le soleil se couche aussi tôt que 17 h 30 et diminue nos heures cyclables.

Pour dormir, nous privilégions le camping sauvage sur la péninsule où, nous a-t-on dit, cette pratique est légale. Mais parfois, il n’y a rien comme un bon lit, surtout quand il est offert. Ainsi, dans le village del Ajusco, qui compte à peine quelques âmes, on a pitié de nous : on nous offre le gîte et le couvert. Nous passerons la soirée à la chaleur d’une pozole (exquise soupe mexicaine) cuisinée avec amour par Teresa, notre bienfaitrice d’un soir. L’hospitalité est d’autant plus la bienvenue que nous approchons du désert, dont on nous a tant parlé.

Le désert

© AdobeStock

« Préparez-vous! », « Apportez assez d’eau! », « Campez à l’abri des regards! », nous avait-on répété sans cesse. À mesure que nous nous approchons de la zone désertique, nous retenons surtout que chaque jour nous offre des paysages magnifiques, et que la route est parsemée de villages et d’arrêts gourmands. Bien qu’à certains endroits l’accotement se fasse plus étroit, les conducteurs sont toujours respectueux et nous ne sommes jamais préoccupés par notre sécurité.

À El Rosario, dernier village avant le désert, nous nous ravitaillons et nous nous offrons même le confort d’une petite chambre, question d’emmagasiner de la chaleur. Le jour du départ, nous voilà un peu trop chargés et surtout fébriles. On nous prédit de bons dénivelés et des nuits exceptionnellement fraîches pour cette période de l’année. Les montées nous font souffrir, mais le paysage est tout simplement magique – et il change à tous les 100 kilomètres!

Cette portion du voyage s’inscrit à n’en point douter dans les lieux les plus féériques que j’ai visités à vélo. La circulation se fait tellement rare dans certaines sections que nous roulons en plein milieu de la route. En chemin, la nourriture et l’eau sont moins abondantes, mais pas inexistantes. Le soleil se fait plus fort le jour et je dois utiliser mon cache-col et mes manches pour me protéger.

Après une pause-ravitaillement au village de Cataviña, l’escale parfaite pour faire le plein, nous atteignons Guerrero Negro, village principal du désert, juste à temps pour Noël. C’est l’occasion de retrouver le confort de l’hôtel pour les festivités. Cependant, la fatigue cycliste nous fera manquer le réveillon sans regrets.

La mer de Cortez

©Catherine Plasse-Ferland

En direction de la mer de Cortez, sur la côte est de la péninsule, nous sommes poussés par un vent de dos. C’est l’euphorie! Nous arrivons à franchir presque sans efforts les 150 kilomètres nous séparant de San Ignacio et de ses palmeraies. Sur la côte, nous quittons définitivement le désert au profit de belles montées et descentes avec vue sur la mer. Nous nous faisons même offrir de l’eau et des collations par un automobiliste au sommet d’une côte particulièrement ardue.

Des plages commencent à apparaître et, après quelques nuits de camping sauvage, nous nous arrêtons au village balnéaire de Loreto pour une première journée de repos bien méritée après plus de 1000 km. Les jambes sont fatiguées. Les nuits dans la tente sont toujours un peu fraîches, et sans son matelas de sol qui a rendu l’âme au début du périple, mon conjoint Jimmy commence à avoir mal au dos. Heureusement que les churros et champurrados (chocolat chaud mexicain) sont là pour nous réchauffer.

Montagnes et plaines intérieures

© Jimmy Vaudreuil

Une longue montée nous attendait pour célébrer le retour à l’intérieur des terres. Les paysages évoluent lentement dans ce climat montagneux désertique. Ce que nous croyions être une descente triomphale s’est avérée plutôt pénible, avec un important vent de face. Nous arrivons dans la région rurale de Ciudad Insurgentes, où nous descendons sans heurts vers La Paz. Nous constatons beaucoup de pollution sur le bord des routes (plastique, verre, etc.). C’est désarmant que de penser qu’on puisse, en toute conscience, jeter ses débris dans un site aussi empreint de majesté…

À La Paz, ville d’environ 240 000 habitants – la plus grande agglomération croisée depuis Tijuana –, nous en profitons pour visiter le centre-ville et son marché public et flâner sur les plages Balandra et El Tecolote, qui valent le détour. Mais nous sentons déjà l’appel de la route.

Contents de poursuivre vers notre objectif final, nous descendons la péninsule du côté ouest par Todos Santos. Entouré de plages, dans un climat estival, le village est plus touristique, mais l’accueil chaleureux de Kevin, notre premier hôte WarmShower du voyage, nous fait sentir à la maison. Après tellement de jours et de repas glanés sur la route dans des étals ou cuisinés sur notre brûleur de camping, ce sera aussi l’occasion de nous exercer à apprêter les ingrédients locaux et de passer de longues soirées à discuter.

Le coin est paradisiaque : hamac et balade sur la plage, baignade bien méritée et marche en ville. L’ouverture et la générosité des gens rencontrés sur la route nous épate depuis le début. La chaleur qui s’installe maintenant dans le climat est aussi présente dans nos cœurs.

Nous quittons à contrecœur Todos Santos, à plus forte raison quand nous découvrons qu’à partir de Cabo San Lucas, la côte est jonchée d’hôtels de luxe et de tout-inclus jusqu’à San José del Cabo. Le détour par la touristique marina de Cabo San Lucas était un passage obligé, mais contrastait énormément avec l’aventure que nous avions vécue dans l’imposante nature de la Baja. San José et son petit centre-ville historique nous servent de repaire pour les derniers jours, afin de profiter une dernière fois des largesses culinaires et de l’accueil mexicain.

La péninsule mexicaine aura dépassé nos attentes. Sa nature grandiose nous a habités durant des semaines à vélo. Je me suis sentie chez moi, au milieu de ces décors naturels d’Amérique du Nord, comme on se sent chez soi dans la forêt tout près de la maison.

Nous repartons donc le ventre plein et les jambes dures, fiers d’une autre aventure cycliste. On voyage à vélo en autonomie pour se découvrir sur la route, faire face à ce qui se présentera et découvrir ses limites. Le pari aura une fois de plus été réussi.


Pourquoi la Baja California est le trajet cycliste idéal

© Jimmy Vaudreuil

· Parcours de 1600 km qu’on peut franchir en 2, 3 ou 4 semaines de vacances
· Orientation facilitée par une seule route à suivre
· Des automobilistes respectueux
· Un pavé pratiquement sans failles
· Des paysages multiples et magnifiques : océan Pacifique, mer de Cortez, déserts et montagnes
· Une gastronomie mexicaine savoureuse et abondante pour cyclistes affamés
· Un vol peu dispendieux depuis le Québec et un coût de la vie abordable
· La possibilité de dormir en tente, en camping sauvage ou en hôtel en fonction des secteurs
· Fêter Noël, le Nouvel an et la Fête des rois au Mexique
· Pour les amateurs de bikepacking, la Baja dispose de l’un des plus beaux parcours du genre au monde : la Baja Divide.


En bref

· Départ : San Diego, États-Unis
· Arrivée : San José del Cabo, Mexique
· Distance totale parcourue : environ 1600 km
· Durée totale du voyage : 25 jours

Sites web pour se préparer :
· Pour la Baja California en cyclotourisme (anglais)
· Pour la Baja Divide en vélo de montagne (anglais)

Meilleures liaisons aériennes pour un vol multi-destinations :
· Plusieurs compagnies offrent des vols depuis le Québec. Il n’y a cependant pas de vol direct vers San Diego ou San José del Cabo
· Il est important de prêter attention aux politiques de bagages concernant le transport des vélos avant l’achat du billet
· Air Canada
o Vol direct Toronto-San Diego, ajouter une liaison depuis Québec ou Montréal
o Retour San José del Cabo, Houston, Montréal
· Aeromexico
o Vol Montréal-Mexico-Tijuana
o Retour San José-Mexico-Montréal

Meilleure période pour réaliser ce périple :
· Décembre à avril – moins de pluie, climat tempéré, saison des baleines
· Prendre en compte que la température est plus froide au nord et qu’elle descend la nuit

Pour parcourir le compte Instagram de l'auteure, c'est par ici.

Commentaires (0)
Participer à la discussion!