Louis Rousseau et Jacques Olek : vers un 8000 hivernal québécois?
Aucun sommet de plus de 8000 mètres situé au Pakistan n’a été conquis pendant la saison hivernale. Une expédition internationale tentera de briser cette marque durant les semaines qui viennent et un Québécois sera de la partie. À 33 ans, Louis Rousseau n’en est pas à son premier exploit en Himalaya : il a déjà grimpé le Broad Peak (8 047 m) et le Nanga Parbat (8 125 m), en plus de s’être attaqué deux fois au K2 (8 611 m). Mais une expédition hivernale constitue une aventure d’une autre envergure. « C’est ce qui sépare les hommes des enfants », a déclaré Jacques Olek, un aventurier de 66 ans qui a déjà fait partie d’une tentative hivernale au K2 et qui accompagnera les grimpeurs jusqu’au Camp de base. Nous avons rencontré ces deux aventuriers avant leur départ pour cette tentative risquée sur Hidden Peak (8 068 m).
Aucun sommet de plus de 8000 mètres situé au Pakistan n’a été conquis pendant la saison hivernale. Une expédition internationale tentera de briser cette marque durant les semaines qui viennent et un Québécois sera de la partie.
À 33 ans, Louis Rousseau n’en est pas à son premier exploit en Himalaya : il a déjà grimpé le Broad Peak (8 047 m) et le Nanga Parbat (8 125 m), en plus de s’être attaqué deux fois au K2 (8 611 m). Mais une expédition hivernale constitue une aventure d’une autre envergure. « C’est ce qui sépare les hommes des enfants », a déclaré Jacques Olek, un aventurier de 66 ans qui a déjà fait partie d’une tentative hivernale au K2 et qui accompagnera les grimpeurs jusqu’au Camp de base. Nous avons rencontré ces deux aventuriers avant leur départ pour cette tentative risquée sur Hidden Peak (8 068 m).
Quelles sont les particularités de grimper un 8 000 m en hiver?
Louis Rousseau : Le défi, c’est vraiment le froid sibérien. En moyenne, il peut faire -15° au Camp de base et en altitude, on peut s’attendre à des -30°, -35°. Ça implique beaucoup de logistique au point de vue de l’organisation du Camp de base et des mois de préparation. Lors de l’ascension, le plus difficile est de pouvoir continuer pendant plusieurs semaines.
Jacques Olek : Une hivernale fait certainement partie des expéditions les plus dures que l’on peut tenter en alpinisme. Le défi est d’autant plus grand qu’il y a, dans la chaîne du Karakoram au Pakistan où se trouve le Hidden Peak, cinq sommets de 8 000 mètres. Et aucun n’a encore été gravi en hiver.
Pourquoi ces sommets du Pakistan sont-ils si spéciaux?
L.R. : Il est très difficile de se rendre à leur Camp de base. La neige arrive très tôt en saison et c’est tout un défi en matière de logistique pour gérer l’apport du matériel par les porteurs. En plus du froid, le vent est une sérieuse contrainte : il y a parfois des vents de 100 à 110 km/heure. Ce sont des conditions extrêmes. Il faut une très bonne météo pour pouvoir accéder à des altitudes élevées. L’endurance physique pendant deux mois sera mise à rude épreuve…
J.O. : J’ai participé à une hivernale au K2 en 1988 et il y a un genre de microclimat dans cette région. Durant nos 40 jours d’expédition, on a eu 9 jours de soleil avec une température moyenne pendant la nuit de -35°.
Racontez-nous l’expérience de cette hivernale.
J.O. : C’était la première tentative d’hivernale sur le K2. Dans notre équipe internationale, quatre Canadiens étaient présents. Il y avait également des Britanniques et des Polonais. L’expédition s’est déroulée sur six mois, soit l’une des plus longues expéditions qui n’ont jamais été entreprises dans l’Himalaya. On a eu une caravane en automne qui acheminait le matériel jusqu’au Camp de base, mais qui ne s’y est jamais rendue. Ça a été l’une des plus grandes difficultés auxquelles on a dû faire face. L’altitude la plus haute que deux de nos cordées ont atteinte a été de 7 350 mètres. À cause des difficultés météorologiques et l’épuisement de l’équipe, on a été obligé d’abandonner. La première erreur a été d’envoyer la caravane trop tard : elle aurait dû partir en septembre, avant les premières chutes de neige.
L.R. : Des dizaines d’années plus tard, on rencontre les mêmes défis. On vient d’apprendre qu’un glissement de terrain sur place nous a fait perdre des barils d’équipement. Heureusement, il n’y a eu aucun blessé, mais on ne sait pas encore si l’équipement perdu est précieux ou si c’est de la nourriture. Cette mésaventure ne compromet pas notre expédition, car il reste un délai suffisant pour envoyer du nouveau matériel avant notre départ s’il le faut.
Qui vous accompagnera à Hidden Peak?
L.R. : Le chef d’expédition sera Gerfried Goschl. C’est un Autrichien avec qui j’ai déjà fait deux expéditions dans l’Himalaya. Deux grimpeurs espagnols nous accompagneront. C’est une coopération entre plusieurs pays. On est également très chanceux d’avoir Jacques avec nous : il a une grande expérience de la montagne et aussi une connaissance des expéditions hivernales. C’est à la fois une équipe internationale et intergénérationnelle!
J.O. : Dans beaucoup d’expéditions, surtout des hivernales, il y a souvent trois générations : les anciens qui s’occupent de la logistique, ceux âgés de 30 à 40 ans qui participent activement et qui sont sur la montagne et les jeunes de 20 ans qui jouent des rôles de porteurs. De sorte qu’il se produit toujours de nouvelles générations qui ne perdront jamais la mémoire de ce qui s’est fait déjà.
Comment se déroulera l’expédition?
L.R. : Nous partirons de la ville de Skardu, qui est un peu comme le Katmandou du Népal, le point de départ des expéditions du Karakoram. Autour, il y a des sommets de 6 000 mètres où nous pourrons nous acclimater. Puis une fois au Camp de base, on attendra une fenêtre de beau temps vers la fin février, début mars. Il y a comme un compte à rebours car après le 20 mars, l’hiver est fini! Notre temps sera compté.
J.O. : La région est une enfilade de très hauts sommets, la plus grande concentration de hautes montagnes au monde. Il y a une quarantaine de 7 000 mètres et cinq de 8 000 mètres. Dans mon expérience, même lorsqu’il a fait beau, on n’a pas vu le soleil plus d’une demi-heure dans la journée à travers les sommets. Et dans ce genre d’expédition, jamais rien ne se passe comme prévu. C’est d’ailleurs ce qui fait l’attrait de ces aventures.
Quels sont vos projets? Le K2 en hiver?
L.R. : Je retourne au K2 cet été. Avec Gerfried, on va s’acclimater sur le Gasherbraum 2 et essayer d’ouvrir une nouvelle voie sur le K2. Le Hidden Peak n’a jamais encore été tenté en hiver et ça va déjà être un défi colossal. Je ne veux même pas penser à ce que le K2 peut représenter en hiver. C’est au-delà de mon imagination. J’y ai déjà fait deux expéditions et j’ai de la misère à imaginer comment on peut le grimper en hiver. Si je tente quelque chose comme ça, il faudra que Jacques vienne avec moi : c’est celui qui peut coordonner ça comme il faut.
J.O. : Les seules tentatives qui ont eu lieu sur le K2 en hiver ont été menées du côté pakistanais et se sont terminées autour de 7 350 mètres. C’est sûr que le K2 sera à un moment donné atteint en hiver, mais ça serait trop précipité d’en parler aujourd’hui. Pour ma part, mes meilleures années sont derrière moi. Je vais me satisfaire de ce projet sur Hidden Peak.
Encore plus
louisrousseau.com
Louis Rousseau souhaite remercier ses partenaires : The North Face, MEC, Fontaine Santé, New England Ropes, Sirocco Communication, MSR, Wax Design et Candice.