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  • © Dan Aponte

Race Across America: mission accomplie pour Sébastien Sasseville

Bien au parfum qu’il devait relever le plus grand défi de sa carrière sportive, l’ultracycliste Sébastien Sasseville en a bavé un coup, mais il a néanmoins franchi le fil d’arrivée du RAAM (Race Across America) dans le délai maximum de 12 jours, non sans avoir pensé sérieusement à jeter l’éponge avec 1000 kilomètres à parcourir.


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Parti de Oceanside, en Californie, le 14 juin pour une chevauchée de 4800 km qui a traversé trois chaînes de montagnes, deux déserts sous des températures de 45 degrés Celsius et 12 États, Sasseville s’est pointé à Annapolis, au Maryland, en 11 jours, 22 heures et 25 minutes, finissant au 12e rang parmi les 33 athlètes au départ, dont plus de 50 % ont abandonné.

Le seul Canadien inscrit dans l’épreuve solo est venu bien près de se retirer au jour neuf.

«Tous les jours, il y avait des noirceurs, de grandes joies et des petits doutes, mais mon corps s’est complètement effondré au jour neuf, résume-t-il quelques jours après son retour à la maison. Mon corps était faible et je n’avais plus de courant dans les jambes. J’ai senti un gros doute de ne pas être en mesure de compléter la course.»

Sasseville était sous le choc après avoir besogné d’arrache-pied à ce projet depuis un an en compagnie des 10 membres de son équipe qui l’accompagnaient.

«J’avais l’impression de laisser tomber toute l’équipe, confie le cycliste, qui souffre du diabète de type 1, la forme la plus sévère de la maladie. Ce fut l’un des moments les plus difficiles de ma carrière. J’étais en pleurs et dévasté.»

«Stratégie de résurrection»

C’est à ce moment que son équipe a pris les commandes.

«J’étais épuisé et je n’étais plus en mesure de prendre les bonnes décisions, explique-t-il. Ils m’ont dit “Tu dors pendant cinq heures et on s’occupe de tout”. Ce fut la stratégie de la résurrection. Quand je me suis réveillé après cinq heures au lieu des pauses habituelles de deux à trois heures, il restait trois jours afin de respecter le délai et 1000 km à parcourir. C’était à mon tour de montrer ce que je pouvais faire.»

De retour sur sa monture, Sasseville a été capable d’avaler les kilomètres à un rythme assez soutenu pour rentrer dans le délai prescrit.

«C’est quelque chose de vraiment spécial de pouvoir dire que j’ai complété la RAAM, souligne-t-il. Il y a plus de monde qui ont réussi à escalader le mont Everest [dont Sasseville en 2008] que de gens qui ont complété la RAAM. Il y a de 15 à 20 ultracyclistes qui réussissent chaque année pour environ 100 grimpeurs qui atteignent le sommet de l’Everest.»

Avec le recul et un peu de perspective, la déception de ne pas avoir réussi un temps aussi rapide qu’il le souhaitait a vite été remplacée par la fierté d’avoir rallié le fil d’arrivée à sa première tentative.

«Je suis tellement fier de l’équipe et c’est mission accomplie. J’avais la forme physique suffisante pour obtenir un meilleur résultat, mais la RAAM, c’est tellement plus que l’effort physique. Nous avons vécu des moments incroyables pour notre première expérience. Nous avons commis des erreurs de recrue, mais nous avons beaucoup appris et l’expérience fut tout aussi satisfaisante.»

De retour dans le futur?

Alors qu’il n’est pas encore tout à fait rétabli de ses efforts, Sasseville s’alignera-t-il de nouveau à la ligne de départ dans le futur ?

«Je veux le refaire, affirme l’ultracycliste de 42 ans, mais peut-être pas en 2023. Mon corps a besoin de repos. La récupération va durer quelques mois. J’ai tellement sollicité mon réseau. Mes amis ont donné tellement d’heures.»

«J’ai encore la passion de vivre de grands projets, mais mon objectif pour le moment est de vivre plein de petites choses simples, de conclure Sasseville. Je n’étais pas un ermite, mais j’ai fait une croix sur plusieurs choses au cours de la dernière année et raté plusieurs événements spéciaux. C’était mon choix, mais je veux me reprendre.»


Des coéquipiers unis pour la vie

Au-delà de sa performance sportive, Sébastien Sasseville est extrêmement fier d’avoir pu regrouper autour de lui un groupe de personnes uni par une mission commune.

«Nous sommes liés pour la vie, illustre l’ultracycliste de 42 ans qui a traversé le Canada en vélo en 2021 et à la course en 2014. Mon seul mérite est d’avoir regroupé tout ce monde autour d’une mission commune. Ce fut l’aspect le plus difficile et celui dont je suis le plus fier. C’est comme bâtir une entreprise. Nous avions une équipe Cadillac alors que d’autres se chicanaient.»

Ces grands projets font carburer le coureur Sasseville.

«Je ne suis pas un médaillé d’or olympique, je ne gagne jamais de course, mais j’accumule des expériences enrichissantes et c’est ce qui me garde en vie, raconte-t-il. Certains de mes partenaires me disaient vouloir améliorer certains aspects de leur vie en participant à ce défi. Ça me rend heureux. La course a eu un impact sur beaucoup de gens.»

Plus grand fait d’armes

Pour toutes ces raisons, l’ultracycliste, auteur et conférencier estime que le RAAM représente son plus grand fait d’armes.

«Pour tout ce que ça implique autour du vélo, je pense qu’il s’agit du plus grand accomplissement de ma carrière. Dans un groupe de 10, il a fallu créer une culture et une cohésion. Je vais prendre le temps de savourer l’accomplissement.»

Sasseville est heureux de démontrer que son diabète de type 1 n’est pas un frein.

«Malgré la maladie, tu peux faire de grandes choses. Au lieu de me battre ou tenter de surmonter la maladie, je l’ai acceptée et accueillie, même si ce n’est pas facile et pas le fun. Dès le moment où tu fais de la maladie une alliée, ça va bien.»

Perte de temps

Compte tenu de son état de santé, Sasseville est persuadé qu’il a perdu passablement de temps, mais il ne s’en formalise pas du tout.

«J’ai perdu des heures et j’aurais pu finir plus haut, mais ça ne me fâche pas, assure celui qui a reçu son diagnostic à l’âge de 22 ans. C’est mon chemin, mon destin. Au départ, c’est le diabète qui m’a donné cette plate-forme, permis d’obtenir des commanditaires et procuré cette carrière.»

La gestion de sa glycémie a été un défi de tous les instants.

«La gestion est déjà difficile quand tu as un travail de bureau et que tu manges trois repas par jour à des heures régulières, souligne-t-il. Lors du RAAM, je me suis retrouvé dans un environnement unique. Il faisait 45 degrés dans le désert et, plus tard, je portais une tuque dans les montagnes du Colorado.»

© Race Across America


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