Des bains de nature sur ordonnance dans les parcs nationaux du Canada
Une visite dans le bureau d’un médecin peut maintenant se conclure par une prescription de « nature » : une entrée gratuite dans l’un des sites de Parcs Canada. Pour l’heure, le programme n’est offert que dans quatre provinces, mais un projet semblable devrait être lancé ce printemps au Québec.
« Il n’y a rien, aucune prescription, en médecine qui n’a pas ne serait-ce qu’un seul effet secondaire négatif, sauf la nature », fait valoir Claudel Pétrin-Desrosiers, présidente de l’Association québécoise des médecins pour l’environnement.
© Dominick Gravel/Agence QMI
Avec un groupe d’experts, elle travaille à l’élaboration d’un programme au Québec misant sur les « bains de forêt » comme soin de santé.
Et il n’est pas nécessaire de se lancer dans une randonnée pédestre de huit heures pour goûter aux bienfaits du grand air, plaisante la Dre Pétrin-Desrosiers.
« Ça peut être un 20 minutes assis dans un parc urbain entouré de biodiversité », assure-t-elle. « L’idée est plutôt d’offrir du matériel pour que les [professionnels de la santé] puissent conditionner leur patient à inclure la nature comme outil supplémentaire dans un plan thérapeutique. »
Depuis le 1er février donc, les médecins de la Colombie-Britannique, de l'Ontario, de la Saskatchewan et du Manitoba peuvent ordonner une visite en nature au moyen d’un laissez-passer individuel d’un an de Parcs Canada.
Ce programme nommé PaRx a été lancé en novembre 2020 par la Fondation des parcs de la Colombie-Britannique.
Le programme provincial de prescription nature qui verra le jour au mois de mai — le collectif Prescri-Nature — est fortement inspiré du travail qui a été fait dans la province de l’Ouest, mais misera davantage sur la proximité et l’accessibilité.
« Les parcs de la Sépaq ne sont pas accessibles à tous », illustre Claudel Pétrin-Desrosiers « Un homme de 70 ans qui habite dans un petit appartement en ville situé dans un ilot de chaleur, il a plus de chance de souffrir de sa condition. Mais si un médecin lui suggère d’aller se promener 3 fois par semaine dans un parc à côté de chez lui, on vient de lui offrir une option intéressante. »
Anxiété et dépression
La Dre Caroline Laberge, elle, prescrit ce programme à ses patients depuis un moment déjà, surtout à ceux vivant avec des enjeux de santé mentale, comme les troubles anxieux et la dépression.
« La nature prend une grande place dans mes recommandations médicales, bien avant les pilules », souligne celle qui est aussi présidente du Collège québécois des médecins de famille.
« Dans le cadre d’une consultation [...] je rentre le code postal du patient et je regarde ce qu’il y a comme espace vert à proximité de son domicile. Je conseille des séances de 20 à 30 minutes dans la nature », détaille la Dre Laberge.
Et la réception est excellente, dit-elle. « Les gens m’en parlent et ils voient la différence très rapidement sur leur état de santé. »
© Ali Kazal, Unsplash
Santé physique
L’ajout d’une composante «nature» dans un traitement est confirmé par la science depuis des dizaines d’années, signale Claudel Pétrin-Desrosiers.
Dans les années 80, une étude avait défà fait la démonstration que les patients hospitalisés dans une chambre d’où ils pouvaient apercevoir des arbres se remettaient plus rapidement d’une opération que ceux qui avaient la vue sur un mur de brique.
« Après 15 à 20 minutes d’exposition à la nature, la fréquence cardiaque diminue, la tension artérielle diminue et le taux de cortisol — l’hormone du stress — diminue », détaille l’experte.
Les bienfaits sont multiples.
« Certains disent que ça pourrait même retarder l’apparition des troubles de démences chez les personnes âgées», poursuit-elle. «Chez les enfants qui ont des TDAH par exemple, une balade de 20 minutes dans un parc peut équivaloir à une dose de Ritalin. »
Et dans un contexte d’adaptation aux changements climatiques, les prescriptions nature deviennent un argument de plus pour préserver la biodiversité.
À lire aussi : 5 raisons d'essayer un bain de forêt