Jimmy Chin : dompter l'inconnu
Dans cette ère de nouvelles technologies et de télécommunications depuis le sommet de l’Everest, capter l’aventure et la distribuer sur les réseaux sociaux est presque aussi important que de toucher le sommet d’une montagne. Et dans ce domaine, peu de gens arrivent à rivaliser avec Jimmy Chin, un aventurier, photographe et caméraman qui a fondé avec d’autres grimpeurs la compagnie de production Camp 4 Collective.
Comment vous décrivez-vous? Un photographe, un caméraman, un aventurier?
C’est vrai que je porte beaucoup de chapeaux, mais c’est pas mal ça : un athlète professionnel, un photographe et un cinéaste. Chacune de ces obligations implique pas mal de choses, mais en gros, cela veut dire que je peux mettre en place des idées d’expéditions, des concepts de projets et réaliser le tout.
Est-ce vous qui approchez les compagnies pour réaliser ces idées ou ce sont elles qui vous courent après?
En fait, c’est un peu des deux. Ou bien c’est moi qui mets en place une équipe et un concept et qui le propose ou bien c’est une compagnie qui me demande de suivre une expédition pour prendre des photos, des vidéos ou même simplement grimper avec les athlètes. Parfois, on me demande même de faire tout cela en même temps!
Comment trouvez-vous vos idées pour ces expéditions?
C’est inspiré par plusieurs choses différentes. Il y a des projets qui sont légendaires et que j’ai toujours eu envie de réaliser, ou des trucs dont personne n’a encore jamais entendu parler et que je veux explorer. Souvent, c’est un attrait géographique incroyable ou une région dont j’ai entendu parler. Parfois, c’est l’activité à faire qui définit l’expédition : le ski, l’escalade et la photographie ne sont en fait que des excuses pour aller explorer le monde et nourrir ce désir naturel de voir ce qu’il y a un peu plus loin.
Est-ce difficile d’obtenir l’argent nécessaire pour réaliser ces aventures?
Oui, ce l’était quand j’ai commencé. J’ai financé ma première expédition au Pakistan en vendant 500 teeshirts. Maintenant, j’ai des commanditaires, des contacts dans des magazines et aussi une certaine réputation de pouvoir mener ce genre de projet à bien et de revenir avec des photos incroyables. Évidemment, ce n’est pas toujours un succès. On peut tout prévoir, tout exécuter à la perfection et être malchanceux. Comparé à l’expédition elle-même, obtenir le financement est assurément plus facile!
C’est sûr que vous placez la barre tellement haute dans ces expéditions, comme dans celle du Shark’s Fin (6 310 m) en Inde. Qu’y avait-il de particulier sur cette montagne?
Juste l’intensité de l’escalade sur cette montagne. C’est si dur pendant tellement de temps. Normalement, quand tu grimpes une montagne, il y a certaines sections qui sont difficiles et d’autres où tu peux prendre du repos. Mais sur le Shark’s Fin, chaque mètre était intense. À trois personnes, la logistique est complexe : nourriture, carburant, type d’escalade, l’équipement et la manière dont vous l’organisez ou le déplacez sur la montagne. Tout était un défi, pas seulement la grimpe, c’est pourquoi une trentaine d’expédition ont échoué sur cette paroi. Nous avions tout préparé pour un plan A, B et même C et D! Durant les trois années qui ont passé entre notre première tentative et notre seconde, nous avons eu le temps de tout optimiser au gramme près!
En voyant les photos, on comprend bien que cette aventure n’a pas été facile…
C’est sûr, mais la vie n’est pas facile non plus. Aussi bien souffrir en expédition qu’ailleurs!
Qu’est-ce que vous diriez à quelqu’un qui veut suivre votre exemple et mettre en place ce genre d’expédition?
Bien, il faut seulement avoir la volonté et l’ambition de le faire. C’est ça, le plus dur. Il faut se commettre et ensuite comprendre comment faire pour réussir. Il y a tellement de façons d’atteindre un objectif que c’est difficile de trouver la bonne solution pour tout, mais si le désir est fort, tout sera possible. Il faut aussi faire ses recherches pour dénicher l’information qui sera primordiale à la réussite de l’aventure.
Auriez-vous un conseil sur la photographie à donner à nos lecteurs?
Robert Capa disait que si votre photo n’est pas bonne, c’est parce que vous n’étiez pas assez proche. Je pense qu’il faut regarder le travail de plusieurs photographes dans différents domaines pour s’en inspirer et développer son propre style. Aussi, prendre en photo ce qui nous passionne est sans doute le plus important pour grandir comme photographe.
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jimmychin.com
Ce reportage a été réalisé grâce à Revo (revo.com)